1. Introduction
La teigne du poireau, Acrolepiopsis assectella Zeller (Lepidoptera : Acrolepidae), un ravageur des plantes du genre Allium originaire d'Europe, a été identifiée positivement pour la première fois dans l'est de l'Ontario en 1993. Son aire de distribution s'étend à l'Asie, à l'Afrique, à l'Europe et au Canada. La teigne du poireau est considérée comme un ravageur redoutable dans certaines parties d'Europe, où, à cause de la présence de plusieurs générations par an, les niveaux d'infestation atteignent jusqu'à 40 %. Là où les générations se limitent à une ou deux par an, l'insecte est sporadique et a une faible incidence économique. Des enquêtes effectuées en 2001 par l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) indiquent que l'insecte est présent et établi dans une zone localisée dans l'est de l'Ontario et l'ouest du Québec (la région de la Capitale nationale, Ottawa-Carleton, et l'Outaouais). En 2002, un seul adulte a été capturé dans le canton de Gwillimbury, comté de York. Aucun dommage n'a été signalé à cet endroit.
Pour de l'information à jour sur l'étude réalisée en 2002, consulter le site Web de l'ACIA sur les rapports annuels d'enquête au http://www.inspection.gc.ca/francais/sci/surv/pesravf.shtml Les signalements de la teigne du poireau reçus en Ontario et au Québec sont les premiers en Amérique du Nord. Selon les enquêtes raélisées, le ravageur ne serait pas présent aux États-Unis, même s'il figure sur la liste des espèces d'insectes préoccupantes (consulter le site http://ceris.purdue.edu/napis/pests/lkmth/imap/usamap.html pour de l'information sur les enquêtes menées aux États-Unis).
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2. Hôtes et dommages
La teigne du poireau est un ennemi connu des espèces du genre Allium. Appartiennent à ce genre, l'ail et les espèces qui lui sont apparentées : ciboulette, oignon vert, poireau, oignon, échalote, ail géant, ail des bois, etc. On compte au total environ 60 espèces (sauvages et cultivées) du genre Allium en Amérique du Nord, dont la plupart sont distribuées dans l'Ouest.
Le poireau est l'hôte privilégié du ravageur, même si d'autres cultures du genre Allium en sont aussi la proie. Les larves creusent des tunnels dans les tissus foliaires, causant parfois la distorsion des feuilles. Elles s'attaquent occasionnellement aux bulbes et aux tiges. Sur les plants d'ail, les larves s'attaquent aussi au fût (figure 1). Les dommages aux feuilles de poireau peuvent empêcher de commercialiser le produit. Les dommages aux gousses d'ail peuvent prédisposer ces dernières aux infections bactériennes ou fongiques secondaires. Les symptômes comprennent galeries et perforations (figures 2, 3 et 4). Sur le poireau, les larves préfèrent se nourrir des feuilles les plus jeunes, mais peuvent consommer des feuilles vieilles de plus de deux mois. Les larves creusent des galeries dans les feuilles repliées, en se dirigeant vers le centre du plant, ce qui laisse une série de « trous d'épingle » sur les feuilles intérieures. Les galeries creusées par les larves dans les feuilles centrales se transforment en rainures longitudinales chez le plant à maturité. Sur l'oignon, les larves se nourrissent à l'intérieur des feuilles creuses, formant des « fenêtres » à la surface du plant. Il arrive que les larves s'attaquent aux parties reproductives de la plante-hôte, mais elles évitent habituellement les fleurs, car celles-ci contiennent de la saponine, une substance qui inhibe la croissance de l'insecte. Les dommages causés à la base de la tige florale peuvent briser la tige.
Apparemment, les dommages sont plus graves sur le périmètre des champs. Dans l'est de l'Ontario, un petit nombre de producteurs pratiquant l'agriculture biologique ont signalé des dommages par cet insecte; les producteurs d'espèces du genre Allium qui adoptent des programmes de lutte intégrée ou traditionnels ne semblent pas touchés par cet ennemi.
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Excréments et dommages au fût d’un plant d’ail.
Figure 1. Excréments et dommages au fût d'un plant d'ail.
Feuilles d’ail géant endommagées, d’où leur aspect lacéré
Figure 2. Feuilles d'ail géant endommagées, d'où leur aspect lacéré.
Dommages sur un poireau
Figure 3. Dommages sur un poireau
Trou d’entrée et galerie creusée sous la surface dans une tige d’ail.
Figure 4. Trou d'entrée et galerie creusée sous la surface dans une tige d'ail.
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3. Identification
La teigne du poireau adulte est un petit papillon nocturne dont les ailes ont une envergure de 12-15 mm et qui mesure 5-7 mm de long au repos, lorsque ses ailes sont repliées. C'est un papillon brun rouge qui est recouvert d'une poudre blanche et qui présente une marque triangulaire blanche au milieu des ailes antérieures lorsque celles-ci sont repliées (figures 5 et 6). Comme c'est le cas de bien des espèces apparentées, les ailes postérieures sont fortement frangées et vont du gris clair au gris foncé. Les oeufs sont blancs, mesurent 0,4 mm de diamètre et sont difficiles à voir. Les larves sont vert jaunâtre (figures 7 et 8), sont ornées de 8 petites taches grises sur chaque segment et possèdent une capsule céphalée brun pâle. Elles atteignent 13-14 mm à maturité. La pupe brun rougeâtre est enfermée dans un cocon à mailles lâches (figure 9). La plupart des cocons sont fixés aux feuilles, mais ils peuvent aussi être fixés à des détritus (matière végétale en décomposition) et à la végétation avoisinante. Le cocon est de taille et d'aspect semblables à ceux d'autres ravageurs comme la fausse-teigne des crucifères; la seule présence de cocons ne permet donc pas une identification positive de la teigne du poireau.
Teigne adulte au repos (vue de côté)
Figure 5. Teigne adulte au repos (vue de côté).
Teigne adulte au repos (vue du dessus)
Figure 6. Teigne adulte au repos (vue du dessus).
Larve se déplaçant sur une feuille
Figure 7. Larve se déplaçant sur une feuille. Les larves restent habituellement cachées à l'intérieur des plants, mais elles sortent aussi à l'extérieur pour changer de site d'alimentation et amorcer leur pupaison.
Larve et excréments dans une galerie creusée dans un plant d’ail
Figure 8. Larve et excréments dans une galerie creusée dans un plant d'ail.
Gros plan d’une pupe dans un cocon à mailles lâches
Figure 9. Gros plan d'une pupe dans un cocon à mailles lâches (cocon d'une longueur de 5-6 mm).
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4. Cycle biologique
Aucune donnée scientifique n'a été publiée sur le cycle biologique de la teigne du poireau en Ontario. Des chercheurs d'Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) ont réussi à faire l'élevage de deux générations de la teigne du poireau sur de la ciboulette cultivée à l'intérieur et espèrent voir apparaître la troisième génération en septembre, une fois que les plantes auront succombé aux dommages causés par les larves. Il se peut qu'il y ait deux ou trois générations par été, mais cette hypothèse doit encore être vérifiée dans des conditions de plein champ. L'information provenant d'Europe indique que l'insecte hiverne au stade adulte dans différents milieux abrités tels que bâtiments, haies et débris de plantes. Dans le nord de l'Europe, la teigne du poireau survit peut-être à l'hiver à l'état de pupe. Au printemps, lorsque les températures atteignent 9,5 °C, les teignes émergent et commencent peu après à se reproduire. Les femelles pondent leurs oeufs individuellement sur la face inférieure des feuilles dès que les températures nocturnes cessent de tomber sous les 10-12 °C. Les femelles pondent jusqu'à 100 oeufs pendant leur durée de vie de 3-4 semaines. Le passage de l'oeuf à l'adulte prend 25-31 jours à 8-9 °C, la fourchette de température la plus propice au développement de l'insecte étant de 20-25 °C. En France, on compte de quatre à six générations selon les régions. Dans le sud de l'Ontario, on croit que deux ou trois générations pourraient survivre. Selon une révision faite en 2002 d'une évaluation des risques phytosanitaires qui a été effectuée par l'ACIA, les répercussions globales de la teigne du poireau seraient faibles.
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5. Surveillance et lutte
L'aire de distribution de l'espèce, qui pourrait inclure la moitié méridionale du Canada et la plus grande partie des États-Unis, semble être en expansion. Il existe sur le marché un piège à phéromone destiné à la surveillance des populations adultes. En Ontario, la teigne du poireau peut être facilement confondue avec un insecte indigène inoffensif présent dans le sud de l'Ontario qui lui est étroitement apparenté et qui s'attaque au smilax herbacé ou raisin de couleuvre. Cet insecte est connu en anglais sous le nom de carrion-flower moth (voir figures 10 et 11). Au cours des enquêtes de dépistage de la teigne du poireau, on utilise des pièges à phéromone pour capturer les mâles adultes. Or, on ne sait pas si les pièges utilisés attirent aussi l'insecte qui s'attaque au smilax herbacé, ce qui, le cas échéant, pourrait fausser les résultats d'enquête. À l'heure actuelle, l'aire de distribution de la teigne du poireau ne chevauche pas celle de cet autre insecte, mais quand elle le fera, il deviendra important de distinguer les deux espèces. Malheureusement, il faudra alors faire appel à un taxonomiste des insectes qualifié afin qu'il soumette les organes reproducteurs des spécimens à un examen microscopique.
Stade adulte du carrion-flower moth
Figure 11. Stade adulte du carrion-flower moth, un insecte semblable qui infeste le smilax herbacé.
Teigne du poireau adulte
Figure 12. Teigne du poireau adulte.
En Ontario, la population établie dans la région de la capitale nationale semble nuire à seulement quelques producteurs pratiquant l'agriculture biologique. Peut-être est-ce en raison de l'absence de produits phytosanitaires homologués et faute d'une intervention culturale efficace. On ne dispose d'aucune estimation des dommages subis par les producteurs touchés en 2002, mais les quelques rapports obtenus indiquent que le ravageur n'a pas causé de pertes économiques importantes sous les conditions climatiques locales. Les répercussions éventuelles de l'établissement de la teigne du poireau dans d'autres zones de production d'espèces du genre Allium n'ont pas été déterminées, mais des mesures visant à prévenir la propagation de cet insecte doivent être mises en place pour éviter des pertes dans d'autres régions de la province. L'évaluation des risques phytosanitaires effectuée par l'ACIA a identifié les parties aériennes des oignons verts à botteler et des poireaux comme des voies de dispersion potentielles; toutefois, les dommages causés par l'alimentation des larves sous la forme de trous et de galeries sont facilement identifiables à l'inspection.
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Il n'existe à l'heure actuelle aucun produit antiparasitaire qui soit homologué au Canada pour combattre la teigne du poireau. Les cultures du genre Allium pratiquées en Ontario font déjà l'objet de traitements insecticides dirigés contre d'autres ravageurs (mouche de l'oignon, thrips et autres). L'information provenant d'Europe indique que les pyréthrinoïdes et les produits à base de Bt réussissent à maîtriser les infestations. Les insecticides sont rarement nécessaires au Royaume-Uni. Voici des méthodes culturales qui peuvent réduire efficacement les populations sous les seuils de nuisibilité : rotation des cultures, plantations retardées, enlèvement des vielles feuilles et des feuilles infestées, destruction des pupes et des larves visibles, récolte hâtive (afin d'éviter les dommages causés par les larves de la dernière génération et l'accroissement des populations), positionnement des cultures sensibles à distance des zones infestées et destruction des débris de végétaux. Selon des documents publiés en Allemagne, un moyen de réduire les dommages aux poireaux consiste à couvrir la culture de filets avant que les femelles n'entrent en activité et de couper les feuilles extérieures avant l'apparition des feuilles d'hiver en fin de saison. En Europe, un certain nombre de prédateurs, de parasites et de pathogènes sont connus pour s'attaquer aux larves et aux pupes de la teigne du poireau. Toutefois, l'efficacité de ces agents de lutte biologique à maîtriser les populations de teigne du poireau n'a pas encore été évaluée en Ontario.
19 déc. 2019 à 12:32
en effet rien de plus écolo..mais il faut bien installer..